Publications scientifiques diffusées sans droit : blocage de 183 noms de domaine

À la demande des sociétés des groupes Elsevier et Springer, le tribunal judiciaire de Paris a ordonné à Free, SFR, Bouygues Télécom et Orange de bloquer, à leur frais, l’accès par leurs abonnés pendant 18 mois, à 183 url des sites Sci-hub et Libgen, diffusant sans autorisation les publications scientifiques qu’elles éditent. Le jugement précise qu’en cas d’évolution du litige par la mise en place de mesures de contournement par les sites en question, les éditeurs pourraient saisir le juge des référés de cette juridiction pour obtenir une actualisation des mesures de blocages.
Les groupes Elsevier et Springer éditent un grand nombre de publications scientifiques et se sont aperçus que les sites Sci-Hu et LibGen diffusaient la quasi-intégralité de ces publications, en violation de leurs droits. Les éditeurs ont demandé au tribunal judiciaire de Paris d’ordonner aux principaux fournisseurs d’accès à internet français, sur le fondement de l’article L. 336-2 du Code de la propriété intellectuelle, de bloquer l’accès à 183 noms de domaine actifs permettant d’accéder à ces plateformes. Pour caractériser l’atteinte à leurs droits d’auteur et droits voisins, elles ont fait établir des rapports d’analyses par une société privée et des constations d’huissiers dont la force probante a été validée par le tribunal. Dans les précédentes affaires dans lesquelles le juge avait ordonné le blocage de noms de domaine, les constatations de la diffusion non autorisées d’œuvres audiovisuelles ou musicales avaient été effectuées par des agents assermentés, et non par des prestataires privés et des huissiers.

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Sauvegardes et serveur dans le même datacenter : faute d’OVH

Si le tribunal de commerce de Lille rappelle que la responsabilité d’OVH ne peut être mise en cause pour les conséquences de l’incendie qui a ravagé ses centres serveurs à Strasbourg, il juge qu’il a commis un manquement contractuel à son offre de sauvegarde automatisée en stockant les sauvegardes dans le même bâtiment que le serveur alors qu’il s‘était engagé à ce qu’elles soient physiquement isolées de l’infrastructure dans laquelle avait été mis en place le serveur privé virtuel de son client. Par un jugement du 26 janvier 2023, OVH est condamné à verser 93 000 € de dommages-intérêts à son client ainsi que 7 000 € au titre de l’article 700 du CPC.
La société France Bati Courtage, dont l’activité est quasi exclusivement en ligne, avait souscrit un contrat de location de serveur virtuel VPS auprès d’OVH ainsi qu’une option contractuelle supplémentaire de sauvegarde automatisée afin de préserver et de pouvoir récupérer des données du serveur dédié. OVH s’était engagé à ce que cet espace de stockage soit physiquement isolé de l’infrastructure où le serveur virtuel privé du client se trouvait. En mars 2021, un incendie a détruit trois datacenters d’OVH à Strasbourg dont celui du serveur virtuel du client. Un mois plus tard, France Bati Courtage qui pensait récupérer ses données de la sauvegarde automatisée a appris qu’elle avait également été détruite car elle était stockée dans le même bâtiment.
Le tribunal commence par relever qu’OVH avait pris toutes les mesures de précaution contre l’incendie et n’avait pas commis de faute lourde ou de graves manquements à la sécurité. Concernant le respect de l’option de sauvegarde, OVH invoque la clause d’exclusion pour cas de force majeure. Or, l’article 1170 du code civil dispose que « toute clause qui prive de sa substance l’obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite. « . Et en l’espèce justement, « réaliser les copies de sauvegarde et les mettre en sécurité, en particulier en cas de sinistre ou d’incendie, est une obligation essentielle du contrat. La clause 7.7 du contrat OVH prive donc de sa substance l’obligation essentielle de la SAS OVH et doit donc être réputée non écrite », conclut le tribunal.
Le client reproche par ailleurs à OVH d’avoir manqué à son obligation d’isoler physiquement la sauvegarde. Le tribunal procède à une analyse fine des termes utilisés dans le contrat pour juger qu’« en stockant les 3 réplications de sauvegardes au même endroit que le serveur principal, OVH n’a pas respecté ses obligations contractuelles vis-à-vis de France Bati Courtage ».Il estime donc qu’OVH doit réparer le préjudice subi par le client du fait de ce manquement. OVH invoque une clause figurant dans ces conditions générales limitant sa responsabilité au montant des sommes versées par le client, soit 1 800 €. Mais le tribunal considère que « la clause de limitation de responsabilité établie par la SAS OVH octroie un avantage injustifié à celle-ci en absence de contrepartie pour le client. Cette clause crée une véritable asymétrie entre les obligations de chacune des parties. En définitive, cette clause transfère le risque sur l’autre partie de manière injustifiée et sans contrepartie pour cette dernière ». Elle est donc réputée non écrite. En conséquence, le tribunal condamne OVH à verser à son client 93 000 € pour le au titre du préjudice pour perte d’actif incorporel, pour les travaux de restitution d’un hébergement des données et des sites, pour le préjudice financier et pour l’atteinte à l’image.

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Contrefaçon de logiciel : condamnation pour procédure abusive

Attaquer en justice pour contrefaçon de logiciel et concurrence déloyale un concurrent, sans pouvoir démontrer ses accusations et en communiquant sur ces affirmations alors qu’elles n’avaient été confirmées par le tribunal peut coûter cher. Par un jugement définitif du 25 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Paris a condamné cette société à verser 100 000 € de dommages-intérêts à la société attaquée indûment pour concurrence déloyale, 20 000 € pour procédure abusive et 40 000 € au titre de l’article 700 du CPC.
La société Clecim accusait la société Deepgray Vision d’avoir commis des faits de contrefaçon de son logiciel lors des opérations de maintenance qu’elle a réalisées en novembre 2014 chez un client. Elle prétendait que Deepgray Vision avait utilisé le code
source de son logiciel XLine à cette occasion, et ainsi contrefait ses droits d’auteur sur ce logiciel ainsi que ses marques XLine et SIAS. Deepgray Vision a été créée le 20 janvier 2012 par trois personnes qui avaient été salariées de Clecim jusqu’au 9 septembre 2011 et qui avaient travaillé sur ces logiciels. Clecim a obtenu deux ordonnances en saisie-contrefaçon et a assigné son concurrent pour faire interdire la reproduction non autorisée la mise à jour de son logiciel XLine et la reproduction non autorisée de ses marques,
Sur la contrefaçon, le tribunal a commencé par considérer que Clecim ne démontrait pas être titulaire des droits d’auteur sur le logiciel à la date des faits litigieux, en raison notamment de l’apposition sur celui-ci d’un copyright © désignant une autre société. De toute façon, le tribunal a conclu à l’absence de contrefaçon du logiciel. D’une part, Clecim ne s’était pas réservée par contrat la maintenance corrective de son logiciel, le client était donc en droit de faire réaliser cette maintenance par Deepgray Vision. Et puis Clecim ne prouve pas que cette intervention impliquait le recours aux codes sources du logiciel litigieux. D’autre part, le tribunal a estimé que Deepgray Vision avait développé sa propre solution logicielle d’inspection de surface dont l’originalité et le caractère innovant sont corroborés par l’expert en informatique ayant assisté l’huissier pendant la saisie-contrefaçon et par l’éligibilité de cette société au statut de jeune entreprise innovante et au crédit d’impôt recherche.
Si Clecim échoue à prouver les faits de concurrence déloyale de Deepgray Vision, elle est en revanche condamnée à indemniser la défenderesse pour des actes de concurrence déloyale par dénigrement par la présentation, comme acquis en justice, à plusieurs clients communs, du principe d’une contrefaçon sur la base de simples ordonnances de saisie-contrefaçon. Le tribunal conclut à l’intention de nuire de Clecim contre Deepgray Vision et au détournement du but de l’action en justice, faisant dégénérer en abus son droit d’agir.
Enfin, le tribunal annule les marques SIAS pour défaut de distinctivité et juge que Deepgray Vision n’a pas contrefait les marques XLine car l’usage qu’elle en a fait était nécessaire pour désigner le logiciel en cause.

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Contrefaçon de logiciel : annulation d’une assignation trop imprécise

Par une ordonnance de la mise en état très motivée du 14 décembre 2022, le tribunal judiciaire de Nanterre a annulé une assignation en contrefaçon de droit d’auteur de la société Dassault Systems Solidworks pour n’avoir pas présenté et commenté le code source du logiciel en cause. Ce manquement a empêché les défendeurs de se défendre.
Dassault Systemes Solidworks reprochait à Emitech de détenir des licences d’exploitation en nombre insuffisant de son logiciel de CAO « Solidworks ». Avant tout débat au fond, Emitech a cependant soulevé une exception de nullité pour vice de forme. Un logiciel est protégé par le droit d’auteur à la seule condition d’être original. Il appartient donc à celui qui se prévaut d’un droit d’auteur dont l’existence est contestée de définir et d’expliciter les contours de l’originalité qu’il allègue. Pour respecter le principe de la contradiction figurant à l’article 16 du code de procédure civile, le défendeur doit connaître précisément les caractéristiques qui fondent l’atteinte qui lui est imputée et apporter la preuve qui lui incombe de l’absence d’originalité. Pour ce faire, au vu des faits reprochés, à savoir l’utilisation du ou des logiciels copiés servilement ou piratés, une comparaison des codes sources ne serait pas utile, mais l’analyse de celui du logiciel Soldiworks « pour définir les éléments et les enchainements logiques qui, en son sein, sont le siège de l’originalité alléguée », affirme le tribunal. Ce n’est pas une caractérisation prématurée de l’originalité de l’œuvre en cause qui est réclamée, mais, « la détermination et la définition objective des éléments subjectifs qui la caractérise pour permettre un débat contradictoire à la fois pertinent et loyal lui interdisant d’ajuster l’assiette des droits qu’elle revendique aux moyens opposés tant dans le cadre d’une fin de non-recevoir que dans celui d’une défense au fond : expliciter n’est pas prouver mais rendre clair et précis ; l’exigence d’explicitation touche à la détermination de la demande et non à la preuve de sa recevabilité ou de son bien-fondé, l’originalité n’étant pas un fait juridique qui se démontre, le cas échéant par présomption, mais une qualification juridique qui s’apprécie », explique le tribunal. Or, l’assignation ne contient aucun développement permettant d’identifier les caractéristiques dont l’originalité conditionne l’existence de ces droits. En raison du défaut d’explicitation du demandeur, l’assignation est affectée d’un vice de forme qui rend une défense utile impossible, faute de détermination préalable du périmètre et de l’assiette des droits opposés.

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Cloud : suspendre un transfert de données en cas de doute sur leur propriété

Par une décision du 16 janvier 2023, le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence a considéré qu’un prestataire de maintenance pouvait légitimement refuser de transférer la base de données de son client car celui-ci ne justifiait pas avoir acquis cet actif dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire de la société propriétaire du fichier.
Une société avait conclu un contrat de maintenance pour trois ans concernant son logiciel d’encaissement dont les données sont sauvegardées dans un espace cloud. La société s’est aperçue que son fichier clients ne contenait qu’une centaine de contacts au lieu de 3 000. Il s’avère que ce fichier appartenait à une autre société qui a été placée en liquidation judiciaire : son ex-responsable a du reste informé le prestataire de ce fait. Celui-ci a donc suspendu les opérations de transfert en attendant d’avoir des garanties sur la propriété du fichier. Or, il est apparu que son client avait racheté le bail mais pas les actifs de la société liquidée. Il ne démontre donc pas qu’il a acquis le fichier ni que le liquidateur l’a autorisé à l’utiliser. Le tribunal en conclut que le prestataire n’a commis aucune faute contractuelle en suspendant le transfert des données.

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Presse en ligne : Francesoir.fr obtient gain de cause en référé

Par une ordonnance de référé du 13 janvier 2023, le tribunal administratif de Paris a suspendu la décision du 5 décembre 2022 par laquelle la Commission mixte paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) a refusé le renouvellement de l’inscription dans ses registres du site francesoir.fr, en qualité de service de presse en ligne, jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de cette décision. Il a également enjoint la CPPAP de rétablir le régime d’aide dont bénéficiait le titre de presse préalablement à la décision refusant le renouvellement de son agrément, et ce, à compter de la date du 30 novembre 2022.
Le site d’information en ligne France-Soir, connu pour ses contenus controversés, s’était vu suspendre son inscription au registre de la CPPAP, le 5 décembre 2022, au motif qu’il était dépourvu du « caractère d’intérêt général quant à la diffusion de la pensée », condition exigée pour un service de presse en ligne. Le tribunal a d’abord considéré que la condition d’urgence était remplie. Il explique que « la décision contestée a pour effet de faire perdre à cette dernière les avantages fiscaux prévus par les articles D. 18 du code des postes et communications électroniques et 72 de l’annexe III du code général des impôts lui permettant notamment de bénéficier de dons défiscalisés ». Ce qui est de nature à remettre en cause le modèle économique adopté par la société éditrice puisque la majorité de ses revenus proviennent de dons défiscalisés. Sur la décision elle-même, il a été reproché à la présidente de la commission de s’être exprimée publiquement et préalablement à la décision, dans le cadre des travaux conduits par la commission Bronner sur la désinformation, indiquant que le site présentait un « défaut d’intérêt général, en raison notamment d’allégations susceptibles de porter atteinte à la protection de la santé publique, ajoutant qu’il faudrait que, sur ce point, la Commission dispose d’une expertise professionnelle sur la potentielle dangerosité des propos ainsi diffusés ». Le tribunal a jugé que « le moyen tiré de ce que la Commission n’aurait pas statué avec toute l’impartialité requise lors de sa séance du 30 novembre 2022 qui a conduit au non renouvellement de l’agrément dont était titulaire ce site est propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée jusqu’à ce que les juges du fond se prononcent sur ce litige ».

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Copie d’un site : condamnation pour parasitisme

« Les nombreuses reprises d’éléments du site c-monetiquette.fr par le site etiquettes-folies.fr précédemment relevées qui doivent être appréhendées dans leur globalité, ce quand bien même chaque élément apparaît comme banal, et indépendamment de tout risque de confusion, ne peuvent être considérées comme fortuites ou relevant des tendances du marché et témoignent d’une volonté de la société Art et Pub de s’inscrire, à titre lucratif et de façon injustifiée, dans le sillage de la société Léa caractérisant ainsi un comportement fautif constitutif d’agissements parasitaires », a jugé la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 16 décembre 2022. Elle a conclu que cet acte de concurrence déloyale constaté a généré un trouble commercial constitutif de préjudice et a condamné Art et Pub à verser 20 000 € de dommages-intérêts.
La cour, qui a infirmé le jugement de première instance, procède à une analyse précise des actes de parasitisme de la reprise d’éléments d’un site internet par un site concurrent. Elle a commencé par constater que le site de Art et Pub Etiquettes-folies.fr était postérieur à C-monetiquette.fr, celui de la société Léa, et qu’il reprenait à l’identique ou presque des rubriques ainsi que les présentations et les textes. L’huissier a par ailleurs consulté d’autres sites du domaine et a remarqué que leur présentation était très éloignée de celle des parties tant au niveau des rubriques que de la présentation des pages. « Ceci montre une singularité dans la présentation du site internet de la société Léa sans que celle-ci ait à démontrer un effort créatif particulier, le site étant connu de l’internaute de par la présentation des pages qui le constituent, qui comportent des rubriques particulières et des systèmes de personnalisation d’étiquettes dédiés ». Enfin, la cour a rejeté l’argument d’Art et Pub lié aux investissements consentis pour le site, constatant qu’ils n’étaient pas liés à sa conception et à sa présentation.

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Méthode Agile : aucun manquement imputable au prestataire

Par un arrêt du 6 janvier 2023, la cour d’appel de Paris a confirmé le jugement du tribunal de commerce du 7 octobre 2020 qui avait jugé que le client ne pouvait reprocher à son prestataire chargé du développement des applications mobiles et internet d’avoir manqué à ses obligations contractuelles, faute d’avoir exprimé ses besoins et objectifs spécifiques et d’avoir effectué des tests. La cour ajoute que le client avait signé les procès-verbaux de recette, attestant d’une livraison conforme à ses attentes. Elle réfute l’idée d’une contrainte dans la mesure où il s’agit de deux professionnels et compte tenu de leurs nombreux échanges. La cour a donc considéré que le prestataire n’avait pas engagé sa responsabilité dans le cadre de ce projet Agile, qui nécessite que le client collabore en figeant ses besoins et qu’il respecte son obligation de paiement.
Oopet, nouvel intervenant sur le marché des animaux de compagnie, avait confié le développement d’une application de gestion de santé des animaux (Oopet Fit) et d’une application de rencontre (Oopet Love) à un prestataire informatique, la société Dual. Le contrat avait été signé sans la production d’un cahier des charges. Dual avait assuré la partie technique et Oopet la partie artistique. Le client s’est plaint de lenteur dans la livraison des applications mobiles et de nombreux dysfonctionnements. Il a finalement décidé de ne plus travailler avec Dual pour les applications mobiles dont le développement a été confié à la société Graph-R. Celle-ci a constaté l’existence de nombreux bugs et a indiqué qu’il faudrait tout reprendre à zéro. Oopet a donc demandé à Dual de lui rembourser les sommes versées, ce que cette dernière a refusé de faire.

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Wikimedia Foundation condamnée à communiquer des données d’identification

Par une ordonnance de référé du 21 décembre 2022, le tribunal judiciaire de Paris a considéré que la communication de données d’identification de l’utilisateur qui avait créé une page Wikipedia sous pseudo constitue une mesure d’instruction légalement admissible, pour laquelle il existe un motif légitime, comme l’impose l’article 145 du code de procédure civile, à savoir une éventuelle action en dénigrement ou sur le fondement du cyberharcèlement. Le tribunal a ajouté que le seul fait que le procureur ait l’opportunité des poursuites, comme le soutient la société Wikimedia Foundation Inc, ne saurait suffire à rendre illicite la mesure d’instruction sollicitée, qui vise à identifier l’auteur de ces actes. En conséquence, il condamne cette société à fournir aux demandeurs les données d’identité civile et l’adresse email dudit utilisateur, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Une personne avait créé une page Wikipedia au sujet d’une société et de son dirigeant dans laquelle figurait des éléments malveillants sur ce dernier, tant au niveau de sa vie professionnelle que de sa vie privée. Une ordonnance sur requête avait fait injonction à Wikimedia de communiquer les données d’identification de la personne qui est intervenue derrière le pseudo. Mais la fondation américaine avait refusé de s’exécuter, ce qui a rendu nécessaire cette assignation en référé.

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Diffamation : acte de procédure, nouvelle publication et délais de prescription

Par un arrêt définitif très bien motivé, la cour d’appel de Douai rappelle qu’en matière de diffamation en ligne, une assignation intervenue après la diffusion d’un texte incriminé constitue un acte interruptif du délai de trois mois de prescription, applicable aux diffamations. Elle précise également que toute nouvelle publication d’un contenu litigieux ouvre un nouveau délai de prescription trimestrielle, en l’espèce un lien sur Twitter renvoyant vers le site sur lequel l’article est publié, sauf s’il s’agit du même éditeur.
Trois anciens salariés de la société Umalis Group avaient créé la société EGS portage salarial, postérieurement à la levée de leur clause de non-concurrence en mars 2018. Le 1er avril 2018, Umalis a publié sur son site un article relatif à la création de la société EGS, en nommant ses ex-salariés et en tenant des propos sur eux très négatifs. Cet article a été relayé plusieurs fois, entre le 1er avril et le 7 août, sur les comptes Twitter d’Umalis et de son dirigeant. Le 30 juillet 2018, Umalis Group a publié un autre article diffamatoire sur les associés d’EGS puis un suivant le 1er août. Ces derniers et EGS ont assigné en référé Umalis et son dirigeant les 16 et 17 août 2018. Une ordonnance du 23 octobre 2018 a jugé ses assignations nulles car non respectueuses du formalisme en matière de diffamation. Le 27 novembre, ils ont assigné Umalis et son dirigeant au fond.
La cour d’appel a estimé que les actes de procédure des 16 et 17 août 2018 avaient fait courir un nouveau délai de prescription jusqu’au 16 novembre 2018. Par ailleurs, l’ordonnance de référé ayant été rendue le 23 octobre 2018, un nouveau délai de trois mois a commencé à courir jusqu’au 23 janvier 2019. Les demandeurs ayant assigné les défendeurs au fond le 27 novembre 2018, la prescription n’était donc pas acquise à ce moment-là. La cour estime en revanche que l’action en diffamation n’est valable que pour les articles parus les 30 juillet et 1er août et non pour celui du 1er avril. Si la cour admet que le fait d’avoir relayé ce texte par un lien sur Twitter constitue bien une nouvelle publication, elle relève cependant qu’il est paru sur le compte Twitter du responsable d’Umalis et de son dirigeant, aussi éditeur du site où l’article est paru. Ces tweets ne font donc pas courir un nouveau délai de prescription. La cour condamne pour diffamation Umalis et son dirigeant à verser 8 000 € au titre des frais irrépétibles aux trois associés d’EGS et à EGS, 15 000 € à un seul des associés et 10 000 € à EGS à titre de réparation.

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