Statut de consommateur pour un client d’une plateforme de crypto-monnaie

Par un arrêt du 21 octobre 2021, la cour d’appel de Montpellier a considéré qu’un client d’une plateforme de crypto-monnaie n’est pas un professionnel mais un consommateur, ce qui permet à ce dernier d’assigner le responsable du site au lieu de son domicile, en vertu du règlement européen « Bruxelles 1bis » du 12 décembre 2012. Peu importe qu’il ait participé, en échange de dons en e-monnaie XEM, au développement de la technologie blockchain NEM destinée à stocker et échanger de la monnaie virtuelle, qu’il ait été membre du conseil d’administration de la fondation NEM ou qu’il ait réalisé plus de 200 opérations sur la plateforme Spectrocoin concernée par le litige. La cour n’a pas davantage pris en compte la somme de plus de 300 000 € dont il disposait sur cette plateforme pour considérer qu’il était un professionnel. En conséquence, sa qualité de simple consommateur exclut l’application de la clause d’attribution de compétence du contrat qui désigne un tribunal lituanien.
Un jeune homme qui avait été victime du piratage de son compte Spectrocoin ayant conduit à un débit de fond de plus de 300 000 € de son portefeuille avait mis en demeure l’éditeur de la plateforme, la société UAB Spectro Finance de droit lituanien, de l’indemniser des sommes retirées de son compte à son insu. Sans succès, il a porté plainte pour escroquerie devant le procureur de la République de Montpellier et a fait assigner UAB Spectro Finance devant le TGI de la même juridiction. La société lituanienne a soulevé l’exception d’incompétence du tribunal français invoquant la clause attributive de compétence du contrat « Virtual currency agreement » qui désigne le lieu de son siège social. Selon cette dernière, la clause serait opposable à son client car il aurait le statut de professionnel. Cette thèse a été validée par le TGI de Montpellier mais infirmée en appel.
Le titulaire du compte, alors qu’il était étudiant, avait participé à cette plateforme pour monnaie virtuelle à titre bénévole et avait reçu en échange un don de 2 250 000 en e-monnaie XEM, qui au départ n’avait aucune valeur, pour lequel il avait ouvert un portefeuille de crypto-monnaie. Entre novembre 2017 et août 2018, les opérations de conversion qu’il a effectuées se sont traduites par un gain de plus de 300 000 €. Pour la cour, ses activités au sein de la fondation NEM ne permettent pas de le considérer comme un professionnel, pas plus que le montant des profits réalisés, le règlement européen ne prévoyant aucun seuil pour la qualification ou non de consommateur. Quand bien même cette activité aurait été régulière, elle n’avait, par ailleurs, pas été déclarée officiellement.