Mots clés pour la vente illicite de billets de spectacle : Google condamné en appel

Par un arrêt très motivé du 29 mars 2023, la cour d’appel de Paris a confirmé le jugement du tribunal judiciaire de Paris qui avait interdit à Google de permettre l’achat de mots-clés « achat/vente, billets/tickets et spectacle/concert » via Google Ads pour toute annonce destinée à un public situé en France, en vue de la vente de billets de spectacle sans autorisation écrite du producteur du spectacle concerné. Elle a, en revanche, infirmé le jugement sur le montant des dommages-intérêts accordés au syndicat Prodiss (Syndicat national des producteurs, diffuseurs, festivals et salles de spectacle musical et de variété) qui était de 40 000 € pour le fixer à 300 000 €, en réparation des préjudices directs ou indirects portés à l’intérêt collectif de la profession représentée par le syndicat. Elle a également augmenté la somme à verser au titre de l’article 700 du code de procédure civile, passant de 20 000 € à 60 000 €. Par ailleurs, alors que seule Google Ireland avait été condamnée en première instance, la cour d’appel a estimé que Google France, interlocuteur unique lors des échanges préalables à l’instance de Prodiss, devait être condamnée solidairement avec la société Google Ireland.
Prodiss avait constaté sur le moteur de recherche Google la présence d’annonces publicitaires de ventes de billets de spectacle de Rammstein, Grand corps malade, Drake ou Metallica renvoyant vers des sites non autorisés à les vendre par les producteurs. Comme le tribunal judiciaire, la cour a estimé que Google Ireland avait engagé sa responsabilité en fournissant le service publicitaire Google Ads à des professionnels qui offrent à la vente des billets de spectacle sans autorisation. En effet, l’article 313-6-2 du code pénal prohibe la vente de billets de spectacle, réalisée de manière habituelle, et sans l’autorisation du producteur ou de l’organisateur de spectacle. Google s’était défendue prétendant qu’une annonce Google Ads ne constitue qu’une simple communication commerciale qui ne permet pas de vendre ou d’offrir à la vente des billets de spectacle et que l’article 313-6-2 du code pénal ne permettrait pas de réprimer l’activité des plateformes d’intermédiation assurant la revente occasionnelle ou autorisée de billets de spectacles. La cour a objecté que « tant de la lettre de l’article 313-6-2 que de son interprétation par le Conseil constitutionnel (point 8 de la décision) que le législateur a inclus dans le champ de la répression les personnes ayant de manière habituelle exposé ou fourni les moyens en vue de la vente de titres d’accès à un spectacle ». Par ailleurs, Google avait revendiqué l’application de l’article 6 I 2° de la LCEN limitant la responsabilité de l’hébergeur. Mais la cour a rejeté ce moyen au motif que Google avait été informée de la vente non autorisée des billets et avait donc eu connaissance de leur caractère illicite.