Condamnation pour extraction prohibée des annonces de Leboncoin.fr

L’arrêt de la cour d’appel de Paris du 2 février a non seulement confirmé le jugement du TGI de Paris qui avait considéré que le site de petites annonces Leboncoin.fr constitue une base de données et que son exploitant a la qualité de producteur de base de données, mais elle a aussi reconnu que Entreparticuliers.com avait procédé à l’extraction et à la réutilisation non autorisée de parties substantielles de données « immobilier » du site Leboncoin.fr. Dans cet arrêt clair et bien motivé, la cour rappelle que la reproduction de contenus essentiels d’une petite annonce est une extraction prohibée, quand bien même cette reproduction s’accompagne d’un lien hypertexte vers le site d’origine. Elle condamne le défendeur à verser 20 000 € de dommages-intérêts et 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Entreparticuliers.com propose aux particuliers depuis 2000 un service payant d’hébergement d’annonces essentiellement immobilières. Leboncoin.fr, qui a été ouvert en France en 2006, permet de diffuser gratuitement des annonces pour tous types de biens. Il publie 800 000 nouvelles annonces par jour pour un total de 28 millions d’annonces publiées. Il est devenu le premier site français de petites annonces en ligne, notamment dans la catégorie « immobilier ». Pour maintenir un volume d’annonces, Entreparticuliers.com avait souscrit auprès du sous-traitant Directannonces un service de piges lui fournissant toutes les nouvelles annonces immobilières publiées par les particuliers en France, dont les annonces publiées sur Leboncoin.fr et reprises sur Entreparticuliers.com sans autorisation. Le premier a assigné le second en contrefaçon sur le fondement du droit d’auteur et du droit sui generis du producteur.
Comme le TGI de Paris, la cour d’appel a reconnu que Leboncoin.fr avait la qualité de producteur de base de données et bénéficie en conséquence de la protection du contenu de la base. Selon elle, Leboncoin.fr justifie de moyens substantiels consacrés à la constitution, la vérification et la présentation de la sous-base de données « immobilier », l’autorisant ainsi à invoquer la protection au titre des articles L. 341-1 et L. 342-5 du CPI. La cour reconnaît que Le bon coin a consenti des investissements liés à la constitution de son contenu, en termes techniques, de communication ou de stockage. Sur ce dernier point, la cour affirme que « les investissements financiers, matériels et humains, qui concourent au rassemblement des données, permettent leur tri et leur stockage afin de favoriser leur accessibilité lors de leur mise en ligne, doivent être pris en compte, l’article L. 341-1 du code de la propriété intellectuelle, visant, ainsi qu’il a été dit, à protéger l’investissement dans des systèmes de stockage et de traitement de l’information, de sorte que c’est à tort que la société Entreparticuliers.com prétend que ces investissements de stockage ne pourraient être assimilés à ceux de l’obtention des données, et relèveraient des programmes d’ordinateurs utilisés dans le fonctionnement d’une base de données ».
La cour retient également que Entreparticuliers.com a procédé à l’extraction et à la réutilisation de parties substantielles de données « immobilier » du site Leboncoin.fr. Le défendeur avait conclu un contrat avec Directannonces pour l’extraction avec indexation d’annonces dans le seul but de prospection commerciale. Les constats d’huissier produits démontrent que les annonces d’Entreparticuliers.fr provenaient en grande partie du site Leboncoin et toutes les données d’origine étaient reproduites, à l’exception du téléphone de l’annonceur, et comportaient un lien de redirection vers Leboncoin.fr.